C’est au milieu de la campagne vaudoise, dans une vieille et belle bâtisse avec de grandes vitrines brillantes que je rencontre Pascal Gauthier. Ce grand et charismatique français est Chef au Restaurant du Jorat à Mézières, en Suisse, et propriétaire des lieux.
Derrière les portes des cuisines, on commence à s’agiter. Pascal distille ses ordres à la brigade, en majorité féminine. Les sauces sont goûtées et rectifiées une dernière fois; sous le mixer-plongeant, une rayonnante purée de courge au curry jaune; sur le piano, une alléchante crème de pistaches d’un vert éclatant. Les « bouchons du Jorat », création du Chef à base de tofu, attendent sagement leur dressage. A l’arrière, les amuse-bouches sont en élaboration, alignés tels de petits soldats colorés, habillés par des mains délicates.
C’est la seconde soirée organisée en partenariat avec Swissoja, une entreprise travaillant avec du soja suisse et parfois de France voisine, afin de produire du lait de soja ainsi que du tofu artisanal. D’origine exclusivement biologique, la fève est travaillée selon les méthodes ancestrales japonaises. La première édition réservée aux professionnels ayant suscité un grand intérêt de la part du public, ce deuxième volet fut donc proposé, et ravis sont ceux qui ont pu obtenir leur précieux sésame. Un menu entièrement végétalien sera servi aux gourmets qui en ont émis le souhait.
Il est vrai que depuis deux ou trois ans, la demande est grandissante pour les alternatives aux menus carnés. Le soja étant habituellement le roi de la protéine dans les repas végétariens et végétaliens, c’est tout naturellement que la production de tofu et de lait de soja augmente chaque année. Pascal Gauthier a ainsi vu juste en s’associant à Swissoja afin de travailler les produits tels le tofu ferme, le tofu soyeux mais aussi le tofu fumé et autres spécialités de saison, ainsi que le vrai lait de soja (voir encadré).
Au restaurant, pas le temps de s’attarder. Les invités arrivent et le Chef les accueille personnellement, tout comme Manuel Martinez, directeur de Swissoja et son équipe au complet. Vicca Green, blogueuse vegan (The Veggie Side) en charge des relations publiques de l’entreprise depuis quelques mois, navigue entre invités, cuisine et smartphone afin de relayer l’événement sur les réseaux sociaux. Accompagnée par mon autre amie et blogueuse vegan Mlle L (Veggie Romandie), nous sommes invitées à nous asseoir après avoir capturé de belles images, comme tout blogueur ou journaliste culinaire avide de secrets à divulguer. Autour de notre table subtilement décorée prennent place des artisans culinaires vegan, un journaliste local, des industriels de l’alimentation conventionnelle, ainsi qu’un membre de Swissoja prêt à répondre à nos éventuelles questions. Et c’est là que la magie commence…
Après un délicieux amuse-bouche aussi vite savouré que j’en ai oublié les composants (heureusement que les photos sont là), nous poursuivons la dégustation avec un magnifique Millefeuilles de courge aux deux currys surmonté d’un biscuit tel une grande roue. Vient alors une étonnante Tarte Tatin d’Endives et sa Glace au Raifort dont le mariage m’a réconcilié avec ces deux produits après des années de méfiance. Ce sont ensuite des Boudins Végétaux Blanc et Rouge d’une étonnante texture que viennent accompagner les vins des caves Jean-René Germanier. Ces breuvages sans additif animal accompagnent chaque plat depuis la première mise en bouche.
Alors que nous commençons à être repues de ce festin, une amusante Fricassée de Bouchons du Jorat en Garniture d’Automne vient nous faire remettre le doigt sur le déclencheur. Nous demandons presque pitié lorsqu’un bluffant Trio de Fromages Végétaux, l’un cru et les autres cuits au four, viennent étoffer nos connaissances en la matière. Un Bricelet d’Aubergine et sa Glace Suzette plus que gourmands apparaissent alors, juste décorés par une touche de crème à la pistache, et nous achèvent sur place.
Nous remettant de nos émotions avec un peu d’eau fraîche et un petit débriefing, quelle n’est pas notre surprise lorsque nous voyons les mignardises arriver; pas une, pas deux, mais toute une farandole ! Petits cannelés à la pistache, rochers au chocolat, pièces de tofu à la courge et aux épices enrobées de chocolat tels des pralinés, bouchons du Jorat aux agrumes… N’ayant plus la capacité mais une très grande envie de les déguster, j’avoue ici que j’en ai subtilisé quelques exemplaires afin de les retrouver au petit-déjeuner… J’espère que le Chef Gauthier, lisant ceci, saura pardonner ma grande gourmandise en honneur de son art.
Chaque mets fut un plaisir tant pour les yeux que pour les papilles, et nos compagnons de tablée s’amusèrent de notre ballet photographique tout au long de la soirée. C’est ainsi que se termine ce somptueux dîner gastronomique hors-du-commun. Après éloges et remerciements, nous prenons congé de nos hôtes en titubant d’ivresse culinaire.
C’est donc tout naturellement que je recommande cette adresse à chaque gourmand, végétalien épicurien ou omnivore curieux de la cuisine végétale.
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Les laits de soja que l’on trouve dans le commerce sont généralement élaborés à partir de farine de soja, d’eau, souvent d’huile et parfois d’un épaississant comme la gomme de guar. Le lait de soja Swissoja est un des seuls laits frais sur le marché européen, c’est-à-dire qu’il est issu directement du pressage des fèves de soja trempées, et rien n’y est ajouté. On obtient ainsi un lait au goût agréable, qui ne forme pas de résidu et qui monte très bien en sauce – un atout pour les cuisiniers.
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